La nourriture
est l’espace d’accueil par excellence de notre transformation, car elle nous
relie au monde par tous les « bouts » de notre être - corps, cœur,
esprit… Partant du constat d’effroyable prédation que nous opérons sur le
vivant, et de cette rupture qui signe notre séparation de la nature, des autres
êtres sensibles, de nous-même et du divin, comment la nourriture peut-elle
justement nous conduire à développer une relation de douceur et de non-violence
avec le monde ? Comment, sur notre chemin d’évolution, peut-elle nous
permettre de passer de la séparation à la communion ?
Selon le principe
d’unité fondamentale présent dans diverses traditions spirituelles, notre corps
et le corps de la terre, temples sacrés de la vie, sont unis dans une étroite
relation d’interdépendance. C’est dans cette relation qui m’unit pareillement aux
étoiles et aux bactéries…, que j’existe. Seul, je ne suis rien. En ce sens, se
nourrir est un acte éminemment symbolique (qui, selon son étymologie
signifie : « mettre ensemble », « joindre »), car
il me relie au monde, et cela dans une
double dynamique : de lui à moi, par les aliments (sa matière) que j’ingère
(« je suis ce que je mange »), de moi à lui par la prédation plus ou
moins grande que j’exerce sur lui. Cette nourriture, trait d’union entre mon
corps et le corps de la terre, à
l’instar de l’eau, de l’air et d’autres nourritures plus subtiles (lumière,
énergies…) signe mon inter-être avec le monde, en même temps que ma survie. Elle
engage simultanément ma responsabilité à l’égard du vivant dans son ensemble.
Une
violence généralisée
Sans s’étendre sur
le constat désastreux de notre prédation sur le monde, notamment par la
généralisation de l’agriculture, de l’élevage et la pêche industrielle, il faut
cependant ouvrir les yeux sur la réalité actuelle, ne serait-ce que pour nous
encourager à la transformer. Le fait est que, par la simple action de mettre un
aliment dans notre bouche, nous commettons multiples violences : violence à
la terre que nous polluons par toutes formes de toxines (pesticides, engrais,
déchets plastiques, déjections multiples…) et dont nous suçons les mamelles
exsangues comme des chatons avides, violence aux autres humains – qu’ils soient
d’ ici, d’ailleurs et de demain, spoliés de leurs ressources minimales par
notre consommation excessive, violence aux êtres vivants que nous tuons,
volontairement ou inconsciemment (animaux d’élevage, poissons, mais aussi
toutes les micro-vies présentes sur la terre et dans les airs), violence à ceux
qui, privés du choix de leur alimentation, sont obligés d’ingérer une
nourriture toxique (enfants dans les cantines, malades dans les hôpitaux,
personnes âgées dans les hospices…). Lire la suite....