(Cet article publié pour la Saint François d'Assise le 4 octobre est une transcription adaptée d'une conférence donnée le 1er octobre 2017 à la paroisse Saint-François d’Assise (paris 19ème) dans le cadre du jubilé de 800 ans de l’arrivée des franciscains en France.)
Parcours de conversion
Même si je suis chrétienne
dans le cœur, à un moment de ma vie, je ne me suis plus reconnue en tant
que chrétienne, justement à cause de la séparation d’avec la nature et le
vivant.
A ce titre, je me sens « marginale » et c'est une grande souffrance pour moi de voir comment on traite le monde, la nature, les animaux… et de voir l’indifférence des chrétiens sur ces questions. Pour moi, c’est un total contresens. Le salut, le ciel que nous cherchons, ne peut advenir que sur et par et avec la terre. J’ai le sentiment qu’en détruisant la création, Son œuvre, nous crucifions le Christ chaque jour.
A ce titre, je me sens « marginale » et c'est une grande souffrance pour moi de voir comment on traite le monde, la nature, les animaux… et de voir l’indifférence des chrétiens sur ces questions. Pour moi, c’est un total contresens. Le salut, le ciel que nous cherchons, ne peut advenir que sur et par et avec la terre. J’ai le sentiment qu’en détruisant la création, Son œuvre, nous crucifions le Christ chaque jour.
Pourtant aujourd'hui, je comprends que c’est
justement dans cette marge, dans cette « frange », dans ce désir de protéger
et soigner ce monde, que je suis aussi profondément chrétienne. C'est, en fait l’écologie
qui m’a ramenée à la foi.
Aujourd’hui, je
comprends qu’il n’y a pas de spiritualité
chrétienne sans écologie, une écologie au sens large. Il ne faut pas se
tromper sur le sens de l’écologie. Je parle d’une écologie intégrale, pas
intégriste; une écologie systémique qui inclut toute la création, l’humain y
compris (écologie et pauvreté sont d’ailleurs intimement liés). La spiritualité
chrétienne est par essence, une spiritualité de l’incarnation, souffle et
matière - « Dieu s’est fait chair ».
La chair de Dieu s’est le Christ, mais aussi toute la création sans une
exception, qu’Il récapitule. L’écologie intégrale n’est pas un
environnementalisme, ce n’est pas une somme de gestes à faire pour la
planète, même si cela est nécessaire, c’est une vision et une relation au monde
renouvelée qui nous engage dans la totalité de notre être, dedans/dehors,
individuellement et collectivement, et qui précède et induit les comportements
écologiques.
L’écologie n’est pas une option, c’est
une nécessité intrinsèque à notre foi. Ce n’est pas la crise, la situation
actuelle, qui nous engage à être « écolo » ; ajuster notre
vision et nos comportements est un impératif éthique et spirituel intemporel.
La situation actuelle rend cet impératif non optionnel.
Parce que Saint François a vécu, peut-être plus que n’importe quel autre, la proximité épidermique avec le cosmos, avec le Christ. C’est le précurseur qui a touché la lune et les étoiles. Il a ouvert la voie, balisé le chemin par sa façon de vivre, de se relier, de prêcher, d’aimer… Il n’y a pas un saint François unilatéral, prisonnier des savants, des historiens, des théologiens… -personne ne connait François dans toute sa complexité (et certainement pas moi), mais un François, libre et vivant qui touche et inspire chacun à sa façon.
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Rôle des franciscains dans cette conversion
Cette écologie spirituelle, ou écospiritualité, concerne tout le monde sur cette terre, car nous partageons tous la « maison commune », mais elle nous concerne nous particulièrement, chrétiens, et nous particulièrement, amis et héritiers de François. Pourquoi ? Parce que Saint François a vécu, peut-être plus que n’importe quel autre, la proximité épidermique avec le cosmos, avec le Christ. C’est le précurseur qui a touché la lune et les étoiles. Il a ouvert la voie, balisé le chemin par sa façon de vivre, de se relier, de prêcher, d’aimer… Il n’y a pas un saint François unilatéral, prisonnier des savants, des historiens, des théologiens… -personne ne connait François dans toute sa complexité (et certainement pas moi), mais un François, libre et vivant qui touche et inspire chacun à sa façon.
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- Parce que les franciscains, la grande famille des amis
de François, sont ses « héritiers officiels ». En ce sens, vous, franciscains avez une responsabilité (response
ability – capacité de réponse) supplémentaire, une nécessité d’exemplarité. En
tout cas, vous êtes attendus! Qui d’autres, si ce n’est vous, pour transmettre
la vision de François, sa façon amoureuse de voir et de vivre le monde dans son
intégralité et d’être présent à chaque particule de vie que Dieu mettait sur sa
route. Cf. Le moine, gardien de la petite église sur la route à côté de Gubbio, tout droit sorti d'un film comme le Nom de la Rose, me parle de l’importance de prendre soin
de ce que Dieu met sur notre route, qu’il s’agisse d’un pauvre, d’un lépreux,
d’un chien ou d’un vers de terre. C’est dans le HIC et NUNC que réside la
réponse, non dans "la thématique".
-
Ce « Hic et Nunc », cet « ici et
maintenant », cette réponse que
nous avons à apporter, quelle est-elle aujourd’hui ? Il est évident que
nous sommes dans un « Kairos », une opportunité formidable, avec ce pape jésuite qui
prend le nom de François, avec Laudato Si’ admirable, avec la COP 21 qui nous a
tous mobilisés. Nous sommes dans une fenêtre temporelle
qui est maintenant et qui ne se reproduira plus. Cf.
C’est comme pour un vol en parapente ; il faut attendre parfois des heures
la bonne brise, mais quand elle est là, il ne faut pas la rater, il faut courir
de toutes ses forces pour pouvoir s’envoler. Deux secondes après, c’est trop
tard. L’opportunité a disparu. Selon
les scientifiques, et selon les paroles du fondateur d’Alternatiba qui est
intervenu il y a peu pour le lancement du label Eglise
Verte, il ne nous reste que 3 années
avant l’irrémédiable! C’est-à-dire que c’est maintenant ou jamais qu’il faut
sauter. Même si on ne peut changer tout, tout de suite, il faut en prendre la
décision aujourd’hui. Cf. C'est comme la sortie du
nucléaire; même s'il est évident que l'on ne peut fermer d’un coup toutes les centrales, si on ne le décide pas maintenant, dans 30 ans nous y sommes encore.
Ce Jubilé ne fête pas un vieillard poussiéreux de 8 siècles, il fête un esprit vivant à l’œuvre. Les franciscains n’arrivent pas en France en 1217, ils arrivent en France à l’instant T et portent une réponse radicale à la situation actuelle. Dieu nous dit : « Choisis la vie ! ». « Choisis la vie et tu vivras, toi et ta descendance…. ». C’est la réponse que nous devons saisir, aujourd’hui plus que jamais. Passer au crible de « Choisis la vie ! » toutes nos pensées, paroles et actes de consommation. Qu’est-ce que cela veut dire spirituellement ? Pour moi, il s’agit de s’ouvrir, par tous les pores de notre peau, à la dimension cosmique du Christ, comme nous y invite saint François, à nous laisser traverser par la Vie dans toutes les sphères de notre être, à toutes les échelles (individuelles, communautaires, collectives, humaines, terrestres.
Ce Jubilé ne fête pas un vieillard poussiéreux de 8 siècles, il fête un esprit vivant à l’œuvre. Les franciscains n’arrivent pas en France en 1217, ils arrivent en France à l’instant T et portent une réponse radicale à la situation actuelle. Dieu nous dit : « Choisis la vie ! ». « Choisis la vie et tu vivras, toi et ta descendance…. ». C’est la réponse que nous devons saisir, aujourd’hui plus que jamais. Passer au crible de « Choisis la vie ! » toutes nos pensées, paroles et actes de consommation. Qu’est-ce que cela veut dire spirituellement ? Pour moi, il s’agit de s’ouvrir, par tous les pores de notre peau, à la dimension cosmique du Christ, comme nous y invite saint François, à nous laisser traverser par la Vie dans toutes les sphères de notre être, à toutes les échelles (individuelles, communautaires, collectives, humaines, terrestres.
-
Notre vocation, "votre mission si vous l’acceptez", est de devenir les chantres, les apôtres de l’écologie intégrale, les gardiens de la Vie, de l’œuvre de Dieu !
Notre vocation, "votre mission si vous l’acceptez", est de devenir les chantres, les apôtres de l’écologie intégrale, les gardiens de la Vie, de l’œuvre de Dieu !
Comment comprendre cet appel à la conversion, vous
qui êtes déjà si convertis, si engagés dans la foi? Qu’est-ce que l’écologie
peut vous apporter sur ce chemin vers Dieu ? Comment ce rapprochement de
la création –et plus le soin porté à la création, peut favoriser la proximité
de Dieu ? Et comment le mettre en œuvre concrètement? Voici quelques
pistes dans les pas de François. !
Je vous, je nous invite, à changer de regard pour changer notre relation au monde, à changer de lunettes, en nous inspirant de la vie de François et de certains épisodes symboliques. (ces analogies ont leurs limites, mais peuvent tout de même nous parler)
Comme François, nous débarrasser de nos vieux habits
Qu’est-ce que se défaire de ses vieux habits peut
vouloir dire pour nous dans ce contexte ? Peut-être cela nous dit :
-
Oser lâcher nos vieilles habitudes, notre confort de
pensée, notre conformisme, nos
limitations culturelles, les faux plis
pris au cours du temps, notre addiction à la pensée de consommation et oser
renoncer à notre identité préfabriquée pour aller vers notre nature véritable,
notre nature inconditionnée, celle qui nous rend proche de Dieu.
-
Apprendre à retrouver notre désir profond et nos talents, les talents que Dieu a voulu pour
nous.
-
Oser faire un pas de côté – nous déplacer, changer notre angle de vision, notre perspective, concrètement changer de lunettes et apprendre à voir le monde avec les yeux de François.
Oser faire un pas de côté – nous déplacer, changer notre angle de vision, notre perspective, concrètement changer de lunettes et apprendre à voir le monde avec les yeux de François.
-
Avoir foi que cela vaut pour chacun. On n’est jamais trop vieux, ou trop jeune, ou trop intellectuel,
ou trop borné, ou trop petit, ou trop inexpérimenté… pour ne pas être touché
par la grâce, ou blessé par la fulgurante beauté du monde… Un brin d’herbe, une
carotte dans la cuisine, une fourmi, un sourire… peuvent devenir le lieu de la
révélation et le vecteur de la conversion. «
Des vues panoramiques les plus larges à la forme de vie la plus infime, la
nature est une source constante d’émerveillement et de crainte. Elle est,
en outre, une révélation continue du divin » - Laudato si- 85
-
Oser regarder en face nos résistances (symbolisées par le père de François, la société bourgeoise
bien-pensante…) et nos peurs. « Celui que tant de splendeurs créées n’illuminent
pas et un aveugle. Celui que tant de cris n’éveillent pas est un sourd. Celui
que toutes ces œuvres ne poussent pas à louer Dieu est un muet. Celui que tant
de signes en forcent pas à reconnaitre
le premier principe est un sot ». Saint Bonnaventure (cité par
Jean Bastaire dans « Pour une
écologie chrétienne »)
-
Et surtout, cultiver le désir sincère de conversion et
la prière.
« Abandonne tout ce que tu
possèdes et suis moi ! ». Il s’agit à la fois d’abandonner tous nos attachements,
nos certitudes, nos jugements… sans peur pour Le suivre, mais aussi,
concrètement, d’apprendre à se passer du superflu pour vivre de l’essentiel….
Apprendre la sobriété heureuse et la simplicité. « Vivre
simplement pour que d’autres puissent vivre ! » comme le
disait Gandhi. Suivre l’exemple des sœurs de Reinecker qui font un formidable travail
de réflexion autour de la Vie simple, et passer à l’action.
« Aime ton prochain comme
toi-même ». Qui
est mon prochain ? Etendre le cercle de notre compassion à toutes les
créatures… sans exception (cf. Mathieu Ricard) et élargir notre champ de vision
dans la compréhension de l’interdépendance entre toute chose. Ce que je fais
ici à des répercussions là-bas, avec les humains et avec toute la création. « L’interdépendance des créatures est voulue par Dieu. Le
soleil et la lune, le cèdre et la petite fleur, l’aigle et le moineau : le
spectacle de leurs innombrables diversités et inégalités signifie qu’aucune des
créatures ne se suffit à elle-même. Elles n’existent qu’en dépendance les unes
des autres, pour se compléter mutuellement, au service les unes des autres ». Les Frères
Karamazov de Dostoïevski.
Sortir d’une vision dualiste du monde et vivre dans
une conscience d’unité.
D’une
part, il n’y a pas les bons et les mauvais, les avancés et les retardés, les
écolos et les spirituels, l’homme et la nature, Dieu et sa Création… Tout est
Un et nous sommes Un en Christ…. « Nous avons besoin d’une conversion qui nous unisse
tous, parce que le défi environnemental que nous vivons, et ses racines
humaines, nous concernent et nous touchent tous… » . Laudato Si. §-13. D’autre part, le choix de « Choisir
la vie », nous le faisons pour nous-mêmes, mais aussi pour tous : nos
ancêtres dont nous avons reçu l’héritage, les générations futures à qui nous le
léguons, les autres peuples avec qui nous partageons la terre, ainsi que tous
les autres vivants. « Créés par le
même Père, nous et tous les êtres de l’univers, sommes unis par des liens
invisibles, et formons une sorte de famille universelle, une communion sublime
qui nous pousse à un respect sacré, tendre et humble…Tout est lié, et, comme
êtres humains, nous sommes tous unis comme des frères et des sœurs dans un
merveilleux pèlerinage, entrelacés par l’amour que Dieu porte à chacune de ses
créatures et qui nous unit aussi, avec une tendre affection, à frère soleil, à
sœur lune, à sœur rivière et à mère terre ». Laudato Si. §-89-
Relever Son Eglise ! « Va, et répare ma maison qui tombe en ruine ! »
On peut l’entendre,
comme François, dans plusieurs sens :
L’Eglise au sens d’Ecclesia, mais aussi d’oekuméne (ensemble du vivant sur la terre), d’une « communauté » comprise de façon de plus en plus large : Les frères avec les sœurs franciscaines (mixité), les chrétiens entre eux (œcuménisme) (cf. Initiative Eglise Verte), les chrétiens avec les autres confessions (interspirituel), l’église avec le reste de la société…, les différentes générations entre elles (intergénérationnel), les différentes disciplines, les unes au service des autres…. Proposition de développer l’idée des Eco-fraternités née durant les Universités d’Eté franciscaines à Brives en 2016 (voir les différentes propositions de gestes concrets qui peuvent être faits ici) et plus loin, développer de petites communautés locales rassemblant des personnes issues de différentes traditions spirituelles (et pas seulement des franciscains) autour de la question de l’écologie et de la solidarité, à travers la méditation, la prière, le partage. Un espace dédié est en cours de création sur le site internet d’AnimaTerra (à venir : www.animaterra.fr )
L’Eglise au sens de notre « maison
commune », la Terre, notre
planète qui nous nourrit, nous porte et nous vêtit …. il n’y a rien qui ne
vienne d’elle.
L’église, bâtiment. Imaginer une église organique (cela existe) qui habite la nature et est
habitée par elle…. Cf. Mon rêve
d’une église avec un arbre qui pousse dedans et les grenouilles de bénitiers.
Prendre des risques et s’engager
Oser sortir de nos zones de confort (principalement psychologiques) et regarder en face
nos résistances aux changements à travers chaque acte du quotidien. Passer
chaque ingrédient de notre consommation au filtre de « Choisis la
vie ! » et « est-ce que cet acte sera profitable au plus petit ou
au plus pauvre sur cette planète » ? de Gandhi. Et pourquoi, ne pas
envisager de faire un travail psychologique pour guérir nos blessures et identifier
nos zones de résistance, plus nombreuses qu’on ne le croit : « Les attitudes qui obstruent les chemins de
solutions, même parmi les croyants, vont de la négation du problème jusqu’à
l’indifférence, la résignation facile, ou la confiance aveugle dans les
solutions techniques. Il nous faut une nouvelle solidarité universelle ».
Laudato Si - § 14
Oser la relation avec les autres traditions
spirituelles, y compris les plus « exotiques ».
Si nous sommes ancrés dans notre foi et en Christ, quel souci y a-t-il à dialoguer ?
Il est inutile de perdre son temps et son énergie à lutter contre un éventuel
risque de syncrétisme. Nous n’en sommes plus là. Il y a urgence à dialoguer, et
dialoguer n’est pas fusionner.
Oser la relation avec les écologistes, y compris l’écologie des profondeurs. De la même façon, arrêtons de perdre notre temps à lutter contre la peur d’un hypothétique retour au panthéisme. L’idole n’est pas là où on le croit. On se trompe de cible. L’idole est dans le capitalisme financier et spéculatif, notre avidité, la recherche effrénée de profit et la surconsommation de ce monde. A choisir, il est moins dangereux pour la vie dans son ensemble de vouer un culte à la nature que de vouer un culte à l’argent. Je vous invite à sortir de cette vision réductrice et à cheminer de la lutte contre le panthéisme, c’est-à-dire une vision dans laquelle nature=Dieu, au pananthéisme, c’est-à-dire une vision selon laquelle Dieu est présent en toute chose dans la nature, vision qui autorise la réconciliation.
Oser la relation avec les écologistes, y compris l’écologie des profondeurs. De la même façon, arrêtons de perdre notre temps à lutter contre la peur d’un hypothétique retour au panthéisme. L’idole n’est pas là où on le croit. On se trompe de cible. L’idole est dans le capitalisme financier et spéculatif, notre avidité, la recherche effrénée de profit et la surconsommation de ce monde. A choisir, il est moins dangereux pour la vie dans son ensemble de vouer un culte à la nature que de vouer un culte à l’argent. Je vous invite à sortir de cette vision réductrice et à cheminer de la lutte contre le panthéisme, c’est-à-dire une vision dans laquelle nature=Dieu, au pananthéisme, c’est-à-dire une vision selon laquelle Dieu est présent en toute chose dans la nature, vision qui autorise la réconciliation.
Oser changer nos modes de vie concrètement, du moins prendre la décision immédiatement, puis
avancer pas à pas. Choisir un domaine de prédilection, celui qui vous fait le
plus réagir (alimentation, déchets, énergie, habitat, transport… il y a le
choix), creuser et continuer.Oser s’engager, militer, monter au front, dénoncer les
injustices… de façon individuelle,
mais aussi collective (comme à l’Arche de Lanza del Vasto). Oser une parole
forte commune contre le nucléaire, contre les OGM, conte les pesticides, contre
la Corrida…. Avec la prière, cela peut avoir une puissance considérable. On ne
peut pas se taire face au crime et à l’injustice. Le pape nous
encourage !
« Je
souhaite saluer, encourager et remercier tous ceux qui, dans les secteurs les
plus variés de l’activité humaine, travaillent pour assurer la sauvegarde de la
maison que nous partageons. Ceux qui luttent avec vigueur pour affronter les
conséquences dramatiques de la dégradation de l’environnement sur la vie des
plus pauvres dans le monde, méritent une gratitude spéciale ». Laudato Si. §-13
Oser transformer les liturgies et les adapter aux rythmes cosmiques, aux rythmes de
la vie, des éléments, oser les chants, la danse, la prière avec le corps…
Entrer dans
la suite de François dans la profondeur intérieure, par la prière, le jeune, la
contemplation, la louange….
Contempler Dieu dans son œuvre car « Tout l’univers matériel est un langage de l’amour de Dieu, de sa tendresse démesurée envers nous. Le sol, l’eau, les montagnes, tout est caresse de Dieu. Laudato Si - §84 – mais aussi parce que « cette contemplation de la création nous permet de découvrir à travers chaque chose un enseignement que Dieu veut nous transmettre, parce que « pour le croyant contempler la création c’est aussi écouter un message, entendre une voix paradoxale et silencieuse » Laudato Si - §14.
Retrouver une relation d’amitié avec notre planète « sœur
notre mère la Terre » par la
prière, mais aussi avec notre propre terre, avec notre corps : Danser,
chanter, prier avec le corps. « Ne crains ni les
notables, ni les puissants, mais sois sage et toujours beau dans tes actes.
Connais la mesure, connais le terme, apprends à les connaître. Et prie lorsque
tu restes en solitude. Aime te prosterner et baiser la terre. Baise la terre
sans repos, aime-la d’un amour insatiable, aime tout le monde, aime tout,
recherche cette exaltation et cette ivresse. Mouille la terre des larmes de ta
joie et aime ces larmes que tu verses. Ne rougis pas de cette ivresse,
chéris-la, car c’est un don de Dieu…» (579). Les Frères Karamazov de
Dostoïevski.
Renouer avec nos émotions. Oser pleurer, oser la compassion et
l’empathie avec ceux qui souffrent comme nous y exhorte le pape. « L’objectif n’est pas de recueillir des informations ni de
satisfaire notre curiosité, mais de prendre une douloureuse conscience, d’oser
transformer en souffrance personnelle ce qui se passe dans le monde, et ainsi
de reconnaître la contribution que chacun peut apporter ». Laudato Si - § 19.
Oser demander pardon pour pouvoir sortir de la
culpabilité qui nous anesthésie, retrouver notre dignité et pouvoir agir de
façon positive et durable en faveur du vivant. « Tout
ressemble à l’océan, où tout s’écoule et communique ; on touche, à une
place et cela se répercute à l’autre bout du monde. Admettons que ce soit folie
de demander pardon aux oiseaux, mais les oiseaux, et l’enfant et chaque animal
qui nous entoure se sentirait plus à l’aise si vous-même étiez plus digne que
vous ne l’êtes maintenant. » Les
Frères Karamazov de Dostoïevski.
Oser la relation intime avec le vivant
Je lance une « invitation officielle » à
suivre les pas de François dans sa relation charnelle et spirituelle avec la
nature, le cosmos, les éléments et les animaux. Je pense qu’il avait non
seulement tout compris de l’écologie intégrale, mais le vivait profondément.
Aller vivre au contact de la nature. Se retirer seul dans une grotte comme François ou dans
la nature (la nature sauvage si possible, pas seulement le « Jardin des
plantes »). Dormir une nuit seul en forêt. Grimper aux arbres et y
accrocher un hamac pour la nuit sous les étoiles et écouter et parler avec la
chouette la nuit. Aller prier régulièrement dans la nature (cf. Les sœurs de
Fausse-Repose ou les sœurs de Taulignan pour la fête de la Création). Mettre
les mains dans la terre, planter des jardins potagers dans vos monastères, faire
pousser tout ce que vous pouvez sur le moindre centimètre carré. Accueillir et
protéger les abeilles en posant des ruches etc.
Rencontrer
les animaux proches ou loin de nous, les oiseaux de nos jardins, les souris de
nos greniers (une souris est passée dans la salle durant toute la conférence,
personne ne l’a remarquée), la coccinelle ou le vers de terre…. Chercher la
rencontre pacifique avec les animaux sauvages, dans la forêt, dans la
montagne ! « Jésus vivait avec les bêtes sauvages et les anges le
servaient » Marc. 1-13. cf. Mon
expérience de vivre seule en forêt, à la rencontre des loups, à la rencontre de
Dieu, à la rencontre de moi-même. « Je l’appelle… il me répond en hurlant ».
Aparté sur les oiseaux. On ne veut pas réduire François aux petits oiseaux,
mais à force de se défier de ce qui pourrait être pris de l’extérieur comme une
réduction sentimentalo-naturaliste, on en est venu à totalement rejeter les
oiseaux de François, et le loup, et toutes les créatures de la nature qu’il
aimait tant, qui l’aimaient tant. C’est une erreur ! Cela fait aussi
partie de François. Cf. Histoire des
oiseaux de saint Damiano durant la canicule. Je demande aux franciscains de
l’église s’il était possible de déposer une petite vasque remplie d’eau au
milieu de tout ce minéral brulant (il fait au moins 40° dans la cour) pour les
oiseaux. La première réponse est : « il n’y a pas que les oiseaux qui
comptent ! ». De la même façon, cf. Santa-Maria de Angeli, énervement des
franciscains face à l’affluence des personnes qui viennent voir les colombes
qui ont niché dans les mains de la statue de François. Non,
il n’y a pas que les oiseaux qui comptent, mais oublier les oiseaux, les
poissons, la cigale, le loup, les agneaux… c’est aussi oublier Dieu. Certains
de dire que c’était seulement dans son vieil âge, qu’il s’intéressait aux
animaux. Un, ce n’est pas vrai, et deux, c’est une injure et un
contresens, parce que c’est le
cheminement de toute une vie qui se concrétise dans cet amour infini de chaque
créature, des plus pauvres des plus pauvres, du plus petit , des sans paroles
….et qui s’exprime avec ferveur et vérité, dans le Cantique des Créatures à l’aune de la mort, alors même qu’il est
maltraité par les rats. « L’homme de Dieu débordait d’esprit de charité,
ayant les entrailles pleines de pitié non seulement pour les hommes, mais aussi
pour toutes les autres créatures. »
(La vie retrouvée de François d’Assise. Jacques Delarun. P.85.)
Exclure l’amitié
avec les animaux est un contresens. Ceux-ci sont un appel silencieux à la
miséricorde et nous en indiquent le chemin. Cette question est d’une grande
actualité. Leur sacrifice perpétuel silencieux est un cri si puissant qu’il en
devient inaudible. « À cause de nous, des milliers d’espèces ne rendront plus
gloire à Dieu par leur existence et ne pourront plus nous communiquer leur
propre message. Nous n’en avons pas le droit. Laudato Si’ - §33 . Notre
responsabilité chrétienne est en jeu. Il n’y aura pas de salut de l’homme sans
le salut du vers de terre ! « Il (François) retirait même
de la route le vers de terre pour qu’il ne soit pas écrasés sous les pas des
passants, ayant de la compassion pour eux, car il avait lu cette phrase au
sujet du Sauveur : « Moi, je suis un vers et non un homme. » « (La vie
retrouvée de François d’Assise. Jacques Delarun, p 86). Nous n’avons pas le droit de
continuer ainsi. C’est un blasphème permanent !
Se réconcilier avec les animaux au lieu de les manger.
Comme
François, refaire amitié avec les animaux est une urgence. Cela signifie
concrètement pour nous de ne plus nous rendre complice de ce qui se passe dans
les abattoirs en consommant de la viande industrielle. (Plus de 90% de la
viande consommée en France est issue de l’élevage industriel. En plus de
l’aspect éthique, les conséquences de cette forme d’élevage sont désastreuses
pour le climat, la terre, les humains et tout le vivant !). Il est étonnant
de trouver des passages où François lui-même rejette la viande « Marchand par le monde en prêchant l’évangile
du Royaume de Dieu, il mangeait peu de viandes dans les maisons des séculiers,
s’ils en servaient en raison de l’observance de l’Evangile, déposant
discrètement les restes ailleurs pour qu’on ne note pas la différence. »
(La vie retrouvée de François d’Assise.
Jacques Delarun, p.
64). Dans la suite du texte on lit que,
après avoir mangé du poulet, il demande à un frère de lui passer une corde au coup et de le trainer
dans Assise en criant : « Voyez, voici
le glouton qui s’est empiffré en cachette de viande de poule ! ». C’est tout à
fait incroyable d’imaginer cela aujourd’hui, mais cela interpellerait
certainement nos consciences. Non seulement François rejette la viande, mais il
sauve les animaux de la mort quand il le peut, qu’il s’agisse des
poissons, Idem p70 « Il était conduit par le même sentiment de piété à l’égard
de poissons : ceux qui avaient été
pris vivants, il les rejetait à l’eau, leur prescrivant de prendre garde à eux
pour ne pas se faire reprendre » (suit un passage sur le lac de Rieti où un pécheur lui offre une
tanche. Il le remercie, bénit le poisson et le rejette à l’eau), ou des agneaux p.85 : « De
quelle affection penses-tu qu’il chérissait les petites Brebis ou les agnelets,
en raison de la grâce d’une nature plus simple ou de la ressemblance au
Seigneur Jésus qu’ils représentent dans les Saintes Ecritures ?
Fréquemment en effet, il les délivra des mains de ceux qui voulaient les tuer
et, ayant acquitté le prix pour qu’ils ne soient pas immolés, il les
rendait à la vie». Cf. Mon histoire quand j’ai sauvé, en le rachetant,
une brebis qui allait partir dans le camion pour l’abattoir. C’est en
partie le projet de l’association AnimaTerra, de créer un sanctuaire pour accueillir
humains et animaux pour vivre en relation de paix ensemble.
Réparer la rupture
Il est plus qu’urgent d’opérer la réconciliation,
de cheminer de la séparation à la communion, de réparer la rupture. Parlant de
Saint François, le Pape nous dit : « Ces récits suggèrent que l’existence humaine repose sur trois relations
fondamentales intimement liées : la relation avec Dieu, avec le prochain, et
avec la terre. Selon la Bible, les trois relations vitales ont été rompues,
non seulement à l’extérieur, mais aussi à l’intérieur de nous. Cette rupture
est le péché. … Pour cette raison, il est significatif
que l’harmonie que vivait saint François d’Assise avec toutes les créatures ait
été interprétée comme une guérison de cette rupture. Saint Bonaventure disait
que par la réconciliation universelle avec toutes les créatures, d’une certaine
manière, François retournait à l’état d’innocence. » Laudato Si’ §- 66.
Il nous faut retrouver notre
virginité, notre innocence, notre spontanéité d’enfance dans la relation avec
Dieu et avec les créatures. Il nous faut guérir la blessure de la séparation :
la nature, les animaux, les étoiles, la lune, le vers de terre …. Tout ce qui est
l’expression visible et invisible de l’amour de Dieu nous aide sur ce chemin de
guérison.
« Aimez toute la création dans son ensemble et dans ses éléments, chaque
feuille, chaque rayon, les animaux, les plantes. En aimant chaque chose, vous
comprendrez le mystère divin dans les choses. L’ayant une fois compris, vous le
connaitrez toujours d’avantage, chaque jour. Et vous finirez par aimer le monde
entier d’un amour universel ».
Les Frères Karamazov de Dostoïevski
Annexes
Mon engagement, en quelques mots, découle de la compréhension du lien entre écologie et spiritualité : Co-fondation du Réseau des Ecosites sacrés qui vise à rassembler des lieux spirituels engagés en écologie, du mouvement œcuménique « Chrétiens Unis pour la Terre », qui vise à sensibiliser les chrétiens à l’écologie, coordinatrice d’un ouvrage sur ces questions « Ecologie et spiritualité : la rencontre », éco-journaliste sur ces questions et rédactrice en chef de la revue Présence (avec le n°3 consacré à une « Approche spirituelle de l’écologie » et n°4 o « Tisser la fraternité universelle » , aujourd’hui, fondatrice de l’association AnimaTerra (animaterra56@gmail.com, site en cours de réalisation).
merci!
Bonne fête à tous les François!
RépondreSupprimerUn grand merci pour cet article percutant et source d'inspiration pour le Groupe d'Action en Écologie Intégrale Notre- Dame- de-Foy que je préside. SVP me dire comment se procurer le troisième numéro de la revue Présence. Nous aimerions en faire l'étude. En retour , il me fera plaisir de vous transmettre le document fondateur qui nous décrit et présente nos axes d,action.
RépondreSupprimerMerci à l'avance
Michel Paradis
paradismi@videotron.ca
Super de voir que cet article fait son petit bout de chemin et dépasse les frontières d'une plume pour la terre. Ce matin, Dominique Lang l'a repris sur son propre blog Eglises & Ecologies. Vive les réseaux sociaux !!!
RépondreSupprimerMerci de cette percutante invitation ! remarquable article ou conférence qui disent si bien les choses !
RépondreSupprimerfrère Marie-Benoît c.s.j.
Académie pour une Ecologie Intégrale
www.academie-ecologie-integrale.org
Merci de cette percutante invitation ! remarquable article ou conférence qui disent si bien les choses !
RépondreSupprimerfrère Marie-Benoît c.s.j.
Académie pour une Ecologie Intégrale
www.academie-ecologie-integrale.org